une observatrice mystifiée

Samedi, 19 heures, c’est l’hiver, il fait noir, il fait froid, il vente; mes clés sont à l’intérieur de la voiture!

Le Sercice routier d’urgence viendra sans doute me secourir. Hélas, mon cellulaire dort près du trousseau. Nulle cabine téléphonique à l’horizon. Il y a bien quelques commerces… Le salon Shellac se trouve à quelques mètres et il est encore ouvert! « Peut-on vous aider, madame? »

On signale pour moi et on me tend l’appareil. L’assistance routière me promet un déverrouillage dans trois quarts d’heure. Que faire d’ici là? Cette longue attente à l’extérieur me transformera en statue de glace. Sans y être invitée, je m’assois sur le bout d’une chaise. J’observe…

Malgré l’achalandage (trois professionnelles et trois clientes), le silence règne. Dans quel temple ai-je pénétré? Sous mes yeux se déroule la liturgie du manucure.

Je consulte le dépliant publicitaire :

O*P*I             Essie           SHELLAC     GelISH           GELAXY

Le latin m’aurait semblé moins énigmatique! Shellac me rappelle mon enfance et le vernis que mon père appliquait sur les surfaces de bois. Serait-ce l’acrylique dont on recouvre aujourd’hui les ongles? Un peu d’aérographie avec ça? Française ou américaine? Je venais d’entrer en territoire inconnu…

Devant moi, deux femmes d’âge moyen, confortablement assises, recueillies, concentrées sur l’observation des procédures consacrées à leurs mains. Les applications de produits se succédaient sans relâche…

Les 45 minutes se sont écoulées sans aucun signe de ralentissement de l’activité rituelle. N’ayant pas osé interrompre la cérémonie, je suis repartie avec mes interrogations à propos de

O*P*I             ESSIE          SHELLAC        Gelish            GELAXY

Vous aurez compris que l’auteure est, selon Lafontaine, « une souris des champs ».