Je ne parlerai pas des institutions religieuses, mais plutôt des œuvres de leurs fidèles, des cathédrales et des basiliques de pays et dénominations diverses, de leur splendeur qui défie le temps, du respect dont on les entoure et du soin que l’on met à les restaurer. Est-il besoin de m’y attarder davantage? Ces œuvres d’art ne sont pas en danger.
Peut-on en dire autant des églises, aux proportions plus modestes, aux ornementations moins précieuses? D’humbles édifices, disséminés sur tout le territoire montréalais, attestent d’une époque de vie collective intense. Bien que non pratiquante, j’ai développé un regard attendri pour ces témoins de notre histoire. Je me suis mise à les repérer, à visiter leurs résidences et à prendre connaissance de leurs écrits, dont les semainiers.
Un sentiment d’urgence s’est développé, il y a un an, lors d’un concert de musique chorale dans la très belle église St-Pierre Apôtre (1201 de la Visitation) : d’une ambiance traditionnelle, vivante, animée par d’irréductibles paroissiens et une équipe d’Oblats de Marie-Immaculée. À la lecture de leurs textes, je découvre que cette communauté religieuse prévoit se délester du temple dans sept ans. Tant de beautés sont-elles appelées à disparaître?
Mais alors qu’arrive-t-il aux paroisses, moins connues et moins fréquentées? Commence ma découverte des fusions. Deux, trois ou quatre églises sont regroupées sous une même équipe pastorale, même conseil et équipe administratifs : Centre-ville, Verdun, et combien d’autres? Même les petites églises de campagne sont touchées : la paroisse St-François-D’Assise de St-Joseph-du-Lac fait partie des « reconstituées ». Malgré tout, la tradition reste encore visible.
Puis arrive le moment fatidique : il faut vendre. Là, c’est tous azimuts! Chapelles, églises et presbytères sont convertis non seulement en domiciles, mais en musée, centre d’art ou d’information touristique, bibliothèque, lieux de dégustation (les bières sont artisanales!), école de cirque, hôtel des enchères, etc. Certains de ces projets gagnent des prix pour la restauration du patrimoine! À Québec, une chapelle anglicane est devenue le Pub de la Chapelle.
Ma nostalgie s’accroît lorsqu’il s’agit de lieux que j’ai fréquentés. La conversion de la chapelle des religieuses cloîtrées Marie-Réparatrice (boulevard Mont-Royal) me trouble; les salons des condos de luxe se partagent le vitrail principal. À chaque passage devant l’édifice, je revois les moniales, leur tunique bleu turquoise posée sur leur habit ivoire, j’entends leurs voix qui s’élèvent dans le chœur…
À la pensée de toutes ces églises transformées, me vient en tête la chanson de Jean Ferrat, «…faut-il pleurer, faut-il en rire, fait-elle envie ou bien pitié, je n’ai pas le cœur à le dire, on ne voit pas le temps passer… »
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Les chalets de Dieu, Actualité, 15 décembre 2012, pp.70-71.
Vivre dans une chapelle, La Presse, 15 septembre, 2012, section maison, p.7
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