Manger de la misère. Expression québécoise qui me traverse l’esprit de temps en temps.
J’y pense aujourd’hui en marchant vers mon appartement. Pentu, ce chemin qui grimpe dans la montagne! Fatiguée par un magasinage intempestif, les bras chargés de colis et même d’un manteau, je peine sur ce raidillon. J’avance lentement, traînant un pied devant l’autre, le souffle court, les mollets douloureux. Je ploie sous l’effort.
Je jauge la distance accomplie et celle à parcourir. Le but me semble encore loin! Je refoule mes plaintes : l’exercice est si bon pour la santé! Devenue escargot humain, je progresse lentement. Je pense à Mermoz et aux pilotes qui ont marché interminablement pour sauver leurs vies, un pas à la fois…
Un bruit de moteur interrompt mes rêveries. Un autobus ralentit à ma hauteur. La porte s’ouvre et le chauffeur me lance : « Avez-vous besoin d’un lift? » Interloquée, je réponds spontanément, bêtement : « Non-merci, je suis à pied! ». Tout le monde sait que ce type de véhicule est réservé aux personnes qui ont payé leur place!
Il me faut quelques secondes pour réaliser que l’offre s’adressait précisément à celle qui se promène à pied! Hélas, j’avais pas reconnu ce geste de galanterie, vestige d’une autre époque.
Je sais ce que tu veux dire, Diane. Plus d’une fois, je me suis retrouvée les bras chargés à monter la côte. Maintenant, si j’ai des paquets trop lourds, j’attends en bas.
La ligne d’autobus 11 est une ligne tout à fait particulière. Ce que tu racontes ne m’a pas surpris. Plus d’une fois, j’ai vu le chauffeur s’arrêter pour laisser monter des gens entre les arrêts. Ils le font (pas tous) par gentillesse ou galanterie, comme tu dis. C’est la surprise du geste qui t’a sans doute un peu déstabilisée.
L’autre jour, je grimpais la côte avec une femme qui habite mon immeuble. Au milieu de la montée, on voit l’autobusarriver. Elle agite son bras qui était dans le plâtre, et l’autobus s’est arrêté net. Nous avons remercié la chauffeure chaleureusement et elle nous a gratifiées d’un large sourire.
La majorité des chauffeurs qui font cette ligne sont très gentils. Quand ils font souvent le trajet, ils finissent par connaître les passagers de la rue Ridgewood. Je me souviens d’un chauffeur qui, à la veille de prendre sa retraite, a annoncé la nouvelle. Tous lui ont souhaité une bonne retraite, certains (surtout certaines) étaient déçus de le voir partir. On lui a demandé comment il occuperait son temps, etc. Disons que ces échanges sont peu communs dans les transports en commun.
La prochaine fois qu’on te fait l’offre de monter, n’hésite pas. Tu ne verras pas cela ailleurs.
Merci pour les éclaircissements. Une amie qui habite aussi la rue m’a confirmé qu’un tel événement n’est possible que sur notre petit circuit. Mes très longues années de vie urbaine n’ont jamais été témoin d’un tel geste de compassion de la part d’un chauffeur d’autobus.
Effectivement peu commun! Je serais heureuse, pour ma part, si les chauffeurs d’autobus arrivaient à l’heure convenue à l’arrêt près de chez moi. C’est tout de même réconfortant d’apprendre que de tels gestes de galanterie ou de civisme se font.
DIane
Après 70 ans de vie urbaine, le geste du chauffeur d’autobus m’a renversée…
Je faisais sûrement peine à voir.
Mes pensées étaient moroses à souhait
Contente de partager ce moment d’émotions
Diane,
Je connais ta côte, j’aurais été essoufflée à moins! Je crois que j’aurais eu exactement la même réaction que toi devant l’offre du chauffeur, trop surprise pour réaliser que c’était véritablement une invitation à monter. Formidable de constater qu’il y a encore des gens qui sortent de leur code de route et qui voient! Et qui donnent préséance au geste humain à poser, au risque de se faire taper sur les doigts. Mon petit-fils de 8 ans t’aurait aussi offert un lift. Il revient parfois de l’école avec un « award for being kind ». Bonne idée que celle de son école, n’est-ce pas, comme moyen de prévenir l’intimidation.
Je suis contente de savoir que certaines écoles jouent un rôle actif dans l’éducation civique des jeunes. Merci
Il ya beaucoup de travail à faire de ce côté.
Diane