À ma campagne
Un été pas comme les autres
Le niveau de l’eau, ici comme ailleurs, est resté anormalement élevé sur les berges, pendant de longues semaines. Deux mois et demi après la grande crue, les goélands, nombreux et jacasseurs, ont retrouvé leurs roches favorites, maintenant sorties de l’eau. Par centaines, ils ont repris leurs rivalités pour une meilleure place, leurs ballets aquatiques et leur salut rituel au soleil couchant.
Tardivement aussi, la famille des canards nous a fait l’honneur de quelques visites, en route vers les grèves à nouveau découvertes. À leurs yeux, ces terres, souvent marécageuses, regorgent de friandises. La mère naviguait en tête et les petits la suivaient hardiment.
Seul le héron manque à l’appel, il n’a pas retrouvé sa place, toujours submergée.
Certains de mes voisins se sont affairés pendant l’inondation, d’autres, dans les jours subséquents. Moi, c’est beaucoup plus tard.
« Moi, je ne ferais jamais cela! »
« Ce n’est pas à toi de faire cela! »
Malgré ces avis, après hésitation et évaluation, je me suis mise à l’œuvre et, accroupie, agenouillée, assise ou allongée, je nettoie le sol entre les pilotis, sous mon chalet. Grâce à mes petites mains, les coquilles de moules, les branches de toutes tailles et les feuilles mortes s’entassent dans de multiples seaux ou cartons.
Malgré l’espace limité (surtout en hauteur) et l’inconfort, je me suis prise au jeu et je trouve ce travail, que j’étais prête à déléguer, très satisfaisant. J’aime organiser, classer, inventer des stratégies pour minimiser mes déplacements; mes genoux, mon dos, mes hanches et mes fesses me sont très reconnaissants. Lorsque le temps est pluvieux ou frais, je poursuis ce déménagement dans mon « sous-sol » aux murs de treillis.
J’ai découvert des objets laissés par des plombiers paresseux : un chauffe-eau rouillé, des sanitaires, des bouts de tuyaux en cuivre ou en caoutchouc. Pour sortir tous ces « joyaux », j’ai appelé à l’aide, mais pour le reste, je me débrouille très bien.
Finalement, je peux rassurer mes amis:
« Tout est sous contrôle, je n’ai plus besoin d’aide ».
Je pense faire partie de celles disant: «Moi, je ne le ferais pas» et j’ai dû ajouter: «Je te trouve bien courageuse de penser le faire». Mais je constate que tu y as pris plaisir et, dans le fond, c’est ce qui est important. Bravo pour ta détermination! Avec les objets récupérés, tu devrais faire une sculpture, peut-être que cela inciterait le héron à revenir… sans faire peur aux canards toutefois!