Texte déjà publié mais effacé par erreur
Enfants, la perspective de l’été nous excitait : nous serions à la campagne et nous retrouverions nos amis saisonniers. Les plaisirs seraient multiples. Le plus fréquent était celui de la plage où nos mères venaient surveiller nos baignades. Les trois heures d’attente après le repas (norme inflexible de l’époque !) taxaient lourdement notre patience. Nous surveillions les aiguilles de l’horloge de la cuisine pour être certains que les adultes n’oublieraient pas l’heure bénie…
Le cinéma du mardi soir restera à jamais gravé dans ma mémoire. Nous traînions nos chaises longues (garnies des friandises appropriées) jusqu’au terrain du docteur Ducharme. Sur l’énorme écran dressé pour la circonstance, défilaient les courts films de la première partie : les pitreries de « «Laurel and Hardy », les dessins animés de Walt Disney (le cri de Woody Wood Pecker résonne encore dans ma tête) ou les exploits des cowboys du Far West (Davy Crocket, King of the Wild Frontier). Par la suite, les longs métrages, particulièrement les comédies musicales, donnaient à rêver…
Les événements de notre saison débutaient le 24 juin par une parade de bicyclettes décorées pour l’occasion ; les tricycles étaient admis. Notre Saint Jean, enfant blond aux cheveux bouclés, revêtu d’une peau de mouton, siégeait sur l’arrière d’une décapotable noire qui fermait le défilé.
Nous avions également droit à une grande virée dans les amusements du Parc Belmont (La Ronde d’autrefois) et au traditionnel pique-nique du midi qui regroupait toutes les familles. Pour cette occasion faste, les pères avaient pris congé et à l’aller, leurs voitures formaient cortège sur la route qui longe la Rivière Des Prairies.
A la fin de la saison se tenaient les Olympiades où des médailles récompensaient les gagnants des compétitions diverses. Les courses en poche de patates nous semblaient spectaculaires, de même que celles à la cuillère où tremblait un petit pois.
Les dimanches midi, nous mangions les restes des soupers thématiques destinés aux adultes : je me souviens des fèves au lard, des « blés d’Inde » et des saucisses italiennes (faites maison). Nous étions spectateurs assidus des tournois de tennis et de la « mascarade ». Une année, ma mère et son amie méritèrent le premier prix lorsqu’elles se présentèrent déguisées en paire de dés : les « Lucky Seven ». Elles portaient des cubes de carton blanc aux faces ornées de larges ronds noirs au nombre approprié; leurs longues jambes gainées de résille apportaient un contraste saisissant.

Nous attentions impatiemment la fin du cocktail qui suivait la messe dominicale; pour l’occasion, les femmes portaient robes et bijoux. Les parents invitaient à tour de rôle « la colonie d’estivants ». Nous attendions « la becquée » dont l’heure déterminerait celle du bain!
Grâce à cette vie collective, j’ai connu, à Sainte Dorothée, huit étés de bonheur, hélas, interrompu par le feu qui détruisit notre chalet…d’été.
